Ce qui s’est passé ensuite
C’est lui assis à côté de moi
Et moi qui m’éloigne
Et lui qui se rapproche
Et sa voix plus grave, et plus insinuante
Et ses bras d’abord sur mes épaules
Et lui qui m’allonge
Et lui qui me déshabille
Et qui me demande si j’ai déjà fait ça
Et moi qui pense à la virginité des feuilles de papier
Au souffle coupé,
Et d’autres mots que j’ai oubliés
Et je vois que je suis nue
Et je sais qu’il est sur moi
Pendant que moi, je vois tout ça comme si mon cul était sur la chaise
Et déjà, j’ai dit non
Et encore, je le répète
Et je suis un bout de bois
Une poupée désarticulée rouillée
Et je sais qu’il me pénètre et je ne sens rien
(Ce n’est qu’après que j’aurai mal)
Sauf le silence qui hurle
Et ses hanches qui me bloquent
Et c’est du plafond, je le fixe, que je me vois
D’avoir voulu rejoindre les oiseaux là-haut.
Non, je l’ai répété,
Et mon corps l’a redit tant qu’il a pu, jusqu’à en prendre le pli, tellement qu’il n’a pas pu,
Et qu’il s’est fini devant moi en me regardant regarder ailleurs
Et que je me rhabille, parce qu’on va dîner, à la cantine, faut pas être en retard
– Jamais autant eu envie de refumer, j’avais arrêté –
Et je suis allée recueillir, à un euro la minute depuis la lointaine Allemagne
la voix de ma grand-mère, pour lui dire que je l’aimais
Et rien d’autre.
Quand j’ai pu m’éclipser, à vouloir vivre dans une ellipse, il m’a courue après rattrapée
– et j’ai encore eu peur d’être impolie.
Et comment je vais, ça va, et il rit comme un môme, content de pas avoir été pris
Et dans sa joie son doigt sur mon nez, en ultime crachat.
La douche ce soir-là qui m’a laissée brûlée
Du bouillonnement en torrents, et le silence qui se calme
Une heure seule et sans bouger, jusqu’à cesser de trembler
Et dormir sans penser
Et me lever dans la nuit pour vomir.