Leur monde.

Iris avait bien conscience de la fragilité de leur monde. C’était comme un repli, en asile, qui tenait de ce qu’elles glanaient. Elles tenaient, vaille que vaille, quelque chose qui était beau, qui sentait bon et gardait les mômes à l’abri.

Elles ne pouvaient pourtant que tenir leurs murs, s’arrimer pour freiner la catastrophe, sur un petit coin de ce qui restait au milieu des ravages. Elles vivaient en marge, aussi aux crochets, et contre, tout contre eux – elles ne parvenaient pas à gagner l’autonomie qui leur aurait permis de rêver une utopie. Elles s’aimaient et pouvaient vivre, ou survivre; c’était tant et si fort qu’elle en aurait pleuré, quand elle pouvait y penser. Et c’était pourtant déjà si dur, et si fragile. C’est ce qui lui faisait rêver, au loin, les bruits qui roulaient jusqu’à elles l’écho de cette maison qui rassemblait des femmes, loin d’ici, pour inventer un autre monde. Iris ne savait pas si un tel lieu existait, mais elle aimait le rêver, les soirs où elle tardait, exprès, en faisant des tours pour ne pas reprendre trop vite le travail de chaque jour, et la fatigue encore des nuits. Peut-être que ça pouvait se construire, un autre monde.

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