Beau comme.

Alors, c’est quoi le mieux ? qu’il demanda. Vaut mieux être beau comme un camion, ou comme un pape ?

C’est que ça se discute – un beau camion, monté sur roues comme des échasses, les jantes brillantes au crépuscule, et la fière remorque… – mais un pape ! lustré à l’âme de pauvre bête, rafistolé tous les quatre matins…

Et lui aussi fourni avec son camion ! Modèle réduit et aéré, le genre de beauté qui ne passe pas inaperçue, dans les vastes champs de fidèles, avec ses petites broderies et le bel écarlate au vent.

C’est que c’est joli, les broderies ! mais un camion, ça ne mange pas de pain, ça se gare facilement dans les parkings dédiés, alors qu’un pape !… faudrait voir à y ajouter du beurre, et des épinards, au pain du Pape, et le pape est mobile, mais à déplacements lents, alors que la vie va vite, et la voie de garage.

C’est que c’est un métier très couru, et pas pour les coureurs ! pour ça qu’on les véhicule, il paraît, à aller au rythme des foules et des rocs stationnaires – et pimpon quand il recule, tout comme le camion ! Et pourtant, même pompette, on ne peut pas dire que le pape fasse des miracles ou autre chose que du bruit, mais reculer: il sait.

Au téléphone

Bien sûr, que ce n’était pas le bon moment – sur la route des toilettes, toute empressée de m’enfermer. Ce n’était pas non plus le bon numéro: ni celui que j’attendais, ni un autre que j’espérais, juste le saut dans l’inconnu en décrochant – tortillée devant la porte.

La voix, je ne la connaissais pas, et pas plus ce qu’elle me voulait. C’était pas le bon moment, et c’était un faux numéro – bien le mien, mais pas celui qu’elle voulait. C’est quand elle a dit qu’elle a commencé à me parler que j’ai eu ma vie à l’envers: elle voulait parler à Zélia, et j’ai imaginé vivre dans l’autre sens, une fois la porte refermée.

Contre-révolution du canapé.

« Les canapés, ces foutus canapés ! »

Il était rare de voir Laure s’énerver avec autant d’éclat; sa sortie tourna vers elle tous les regards. Les amies, réunies dans la cuisine d’Emma, échangeaient maintenant des coups d’œil perplexes, avec une petite inquiétude, quand Marion éclata, mais de rire, cette fois:

« Mais que t’ont-ils fait, les canapés ? »

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Réveil difficile

Réveil difficile dans une matinée placée sous les auspices d’une météo peu clémente – mon anémomètre s’agite sous les bourrasques de vent, j’en ferai le relevé plus tard. La lente montée de l’eau dans le café en poudre me rappelle un alambic – la pince du café a disparu, engloutie par le désordre de la veille – et de l’avant-veille, et des jours précédents – laissés sur la table. Le café achevé, j’en entame la décantation dans une longue attente mâtinée de torpeur, à peine éclairée par l’ampoule intermittente du frigo laissé entr’ouvert.

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