À la fin, les puces.

S. n’aimait pas tellement traîner. D’habitude, les puces, c’était au démarrage que ça l’intéressait. Elle aimait voir les caisses sortir des brouettes en approchant, et les petits chalets s’ouvrir. Les matins étaient souvent encore vivables – ça devenait rare de trouver des gens en pleine lumière en pleine journée. Les plus riches restaient, c’était de coutume, dans le bâtiment en dur, et surtout climatisé – les jours de canicule, on faisait payer l’entrée. La zone avait été ombragée en tirant de longs paillage, et des draps : S. avait pénétré un genre de moiteurs à mesure qu’elle avançait. À l’extérieur, les gens n’avaient que des parasols, parfois des tentes isothermes, qui restaient rarement fraîches – on voyait s’agiter des livreurs de glaces un peu partout : c’était un des boulots les plus faciles pour les gamins en errance.

Cette fois, elle avait lambiné. Elle voyait un spectacle pas tout à fait inverse : la remballe se faisait avec un soin plus pressé, quelques prix bradés. Avant, S. aurait pu voir les poubelles déborder et plonger, avec d’autres, pour récupérer deux trois rattrapables. C’était fini : les biffins avaient gagné le monde. Puisque le monde ne se renouvelait plus, il fallait le recycler, et ils s’y étaient mis. C’était pas le lyrisme qui les mouvait ; c’était l’instinct de survie et la conscience d’une demande qu’ils avaient compris, c’est-à-dire les besoins vitaux de la relégation et du malheur. Ça bricolait dans tous les sens, jusqu’à la fin des puces, plus louches et interlopes, quand la misère se remballait.

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