Vaille que vaille.

Ça se passait vaille que vaille. S. continuait à ne pas compter les jours : elle n’attendait rien, elle voyait juste les orteils dépasser des chaussures éclatées des garçons, les reprises aux manches et les ourlets en rallonge multicolores. Ils mangeaient davantage, grandissaient sans cesse, s’engueulaient parfois – la place venait à manquer. Elle ne se sentait pas encore vieillir ; elle savait que ça viendrait. Ses jambes enflaient déjà, de la sédentarité, par la chaleur, même en les gardant en l’air aussi souvent qu’elle le pouvait – ça lui donnait des airs de trapéziste d’intérieur.

Ils continuaient, au gré des pénuries et des abondances subites, des rencontres que parvenait à faire S. et aux menus services qu’elle arrivait encore à monnayer dans le voisinage, sans attendre la suite, parce que c’était ça, la vie, la poussière qui toujours revenait, l’eau qui partait et qu’il fallait retenir, les chaussures qui s’éclatent et que l’on remplace par des modèles de trente ans chinés aux puces. Ça ne passait plus, les modes, en tout cas plus chez eux – d’ailleurs, plus rien ne passait.

Laisser un commentaire